Proverbe/citation
du jour
“La vraie richesse est discrète.”-Monique Bosco
Les élus de notre région ont-ils assez de guts pour ne pas
plier face aux enverdeurs?
Il y a quelques jours, je lisais dans le journal L’Avantage
gaspésien un article de Dominique Fortier intitulé «Le
projet Gaspésia de Pétrolia n'enchante pas les élus locaux».
La compagnie Pétrolia doit bientôt compléter des travaux entrepris
il y a de cela cinq ans sur un territoire adjacent au Parc de la
Gaspésie.
Selon l’article, le préfet de la MRC de la Haute-Gaspésie, Allen
Cormier, de même que le maire de Sainte-Anne-des-Monts, Simon
Deschênes, et le député de Matane-Matapédia, Pascal
Bérubé, ne semblent pas enthousiastes face à ce projet.
Je tiens à être clair quant aux possibilités de développement
liées à l’industrie pétrolière en Gaspésie, de même que sur
l’île d’Anticosti : je ne crois pas au Klondike, mais même
si les retombées sont mineures, ce seront quand même des retombées,
et nous en avons besoin.
Qu’en est-il des risques liés à l’exploitation des
hydrocarbures gaspésiens? Je ne crois pas, compte tenu des normes
que les entreprises doivent respecter, que les risques soit aussi
grands que ce que les enverdeurs veulent nous faire croire.
Concernant la recherche ou l’exploitation pétrolière et gazière
près du Parc de la Gaspésie, qui parmi vous se souvient des Mines
Madeleines? Le gisement de ces mines a été découvert en 1964, avec
l’ouverture officielle en septembre 1968. La mine a été en
exploitation de la fin des années 1960 jusqu’au mois de juin 1982,
avec une interruption durant la seconde moitié des années 1970, de
janvier 1977 à 1979.
Que ce serait-il passé si des environnementalistes avaient bloqué
le projet des Mines Madeleine à l’époque?
J’ose espérer que les élus de notre région ont assez de guts
pour ne pas plier face aux enverdeurs, comme ceux qui militent encore
cet automne au puits No 4 de Junex, près de Gaspé, parce que
malheureusement, de nos jours, l’image à court terme passe trop
souvent avant les intérêts de la population à long terme.
Un document intéressant portant sur l’exploitation minière dans
la région se trouve ici.
En guise de conclusion, voici un texte de David Descôteaux datant de
2006, « L’or noir de la Gaspésie ». Malgré son âge,
l’article ne perd pas sa pertinence. Je remercie d’ailleurs
l’auteur qui m’a permis de le recopier ici bas.
Plus
de deux milliards de barils de pétrole dorment au fond du golfe du
Saint-Laurent. Québec surmontera-t-il les obstacles qui l'empêchent
de les exploiter?
Au
bord de la baie de Gaspé, d'un puits d'une profondeur de 1000 mètres
vient de surgir un gisement qui risque de changer la face de
l'économie du Québec. Pétrolia, une entreprise de Rimouski, a
prouvé qu'il y a bel et bien des réservoirs d'huile en Gaspésie.
En mai dernier, en 15 jours seulement, l'équivalent de 491 barils de
pétrole a giclé du puits Haldimand #1, soit plus d'une trentaine
par jour. Une première au Québec.
"Haldimand,
c'est la découverte de l'année: 34 barils par jour, c'est plus que
la capacité moyenne des puits de l'Alberta", souligne Isabelle
Proulx, responsable du développement des affaires chez Pétrolia. En
Alberta, les puits produisent en moyenne 18 barils par jour. La
différence, c'est que cette province en a des milliers. Haldimand
deviendra le premier puits commercial québécois. "Mais ce
n'est qu'un début", assure Isabelle Proulx. "Nous ne
connaissons pas encore la quantité de pétrole que nous pourrions
extraire des autres puits", ajoute Jean-Yves Lavoie, président
de Junex, qui détient une participation de 45 % dans ce projet, dont
Pétrolia détient aussi 45% et la société Gastem 10%. Car il y
aura d'autres puits. Le consortium évalue en ce moment la remontée
de pression du puits Haldimand, afin de mieux comprendre l'étendue
du gisement. "Ensuite, nous allons nous mettre à forer
intensivement", poursuit Jean-Yves Lavoie. Compte tenu du prix
actuel du pétrole sur les marchés boursiers, les entrepreneurs ont
beau jeu. "À 75 dollars le baril, une production de seulement
11 barils par jour devient rentable, dit Jean-Yves Lavoie, et nous
visons de 300 à 1000 barils par jour au cours de la prochaine
année", ajoute-t-il.
Un
premier gros joueur
Forer
coûte cher : jusqu'à deux ou trois millions de dollars par trou,
selon la profondeur. Pour des petites sociétés comme Pétrolia,
Junex et Gastem, cela signifie que l'on doit être constamment à la
recherche d'investisseurs prêts à prendre des risques. Maintenant
qu'on a découvert du pétrole en quantité suffisante, la donne
vient de changer. Les entrepreneurs de la Gaspésie ont confiance que
les bailleurs de fonds vont se manifester d'eux-mêmes.
"Pour
un investisseur, une entreprise qui peut afficher des revenus de
production est beaucoup plus crédible, explique Isabelle Proulx. Je
reçois d'ailleurs de plus en plus d'appels de l'Ouest canadien.
Là-bas, les gens s'intéressent à ce qui se passe chez nous",
ajoute-t-elle.
Récemment,
Talisman, le géant canadien de l'énergie, dont la capitalisation
boursière s'élève à environ 20 milliards de dollars, a acquis
plusieurs permis d'exploration dans les basses terres du
Saint-Laurent. Cette entreprise albertaine mènera des travaux
d'exploration dans des terres situées près de Bécancour. "Si
un géant comme Talisman décide de venir ici parce qu'il y croit et
qu'il réussit dans les basses terres, cela aura un gros impact qui
nous donnera de la crédibilité sur le plan mondial", affirme
Isabelle Proulx.
Un
potentiel qui fait rêver
Si
on a tardé à découvrir du pétrole, c'est parce que le forage,
chez nous, est à un stade précoce. Seulement 100 trous ont été
creusés au Québec au cours des 100 dernières années. La
découverte du gisement de Leduc, qui a marqué le début de la
production pétrolière en Alberta, a exigé pour sa part 133
forages.
"En
Gaspésie, on va forer 20 puits, cette année. En Alberta, ils vont
en forer 15 000, juste pour le gaz naturel", illustre
Jean-Thomas Bernard, titulaire de la Chaire en économique de
l'énergie électrique (GREEN) de l'Université Laval. Pourtant, le
pétrole ne manque pas, des frontières de l'Ontario jusqu'à
Terre-Neuve, et même sous l'eau, dans le golfe et dans l'estuaire du
Saint-Laurent. Hydro-Québec Gaz et Pétrole a déjà fait 350
kilomètres de prospection sismique dans les grandes forêts qui
couvrent l'île d'Anticosti. Avec son partenaire, Corridor Resources,
Hydro a trouvé dans le sous-sol de cette île des structures
poreuses gorgées de liquide qui ont un potentiel de 130 millions de
barils de pétrole et de plus de 200 millions de pieds cubes de gaz
naturel.
Mais
c'est à la structure géologique marine Old Harry, située à 80
kilomètres au nord-est des Îles-de-la-Madeleine, que se trouve
l'eldorado : deux milliards de barils de pétrole, ou quatre à cinq
milliards de pieds cubes de gaz naturel, selon les estimations
d'Hydro-Québec. L'équivalent, pour le Québec, de 25 années de
consommation.
Des
obstacles majeurs
Toutefois,
en milieu marin, les investissements requis sont colossaux : de 30 à
50 millions de dollars pour un seul forage, soit dix fois plus que
sur la terre ferme. Pour pallier cette difficulté, le gouvernement
du Québec, qui a placé l'exploitation des hydrocarbures au centre
de sa stratégie énergétique de 2006, cherche à attirer les
investisseurs privés. Plusieurs obstacles rendent cependant les
investisseurs nerveux. Entre autres, l'exploration marine soulève de
délicates questions environnementales. Les levés sismiques,
nécessaires pour évaluer le potentiel d'un bassin, pourraient
mettre en danger les écosystèmes marins, soulignent certains
écologistes.
Lors
de ces levés, des bateaux font exploser des bulles d'air comprimé
près de la surface de l'eau. Les détonations se répercutent sur le
fond marin et sur les structures du sous-sol. Les écologistes
craignent que les baleines, qui sont des animaux sensibles aux sons,
ne soient blessées par l'intensité de ceux-ci. Des groupes comme
l'Union québécoise pour la conservation de la nature avancent,
études à l'appui, que ces sons peuvent entraîner des pertes de
sensibilité auditive, voire la mort de certains rorquals.
Paul
Einarsson, de GSI, une entreprise de Calgary qui a reçu le mandat
d'effectuer les premiers levés sismiques dans le Saint-Laurent,
n'est pas de cet avis. "Pendant les années 1970 et 1980, nous
avons fait des levés sismiques sur une distance de plus de 60 000
kilomètres dans le golfe du Saint-Laurent. Les intensités sonores
étaient bien supérieures à celles d'aujourd'hui, et nous ne
prenions aucune des précautions actuelles. Malgré cela, nous
n'avons jamais constaté de dommages." Lors des audiences
publiques tenues en 2004, Québec a affirmé qu'il se plierait aux
recommandations du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement
(BAPE, voir page 38), notamment en assujettissant chaque levé
sismique à l'article 22 de la Loi sur la qualité de
l'environnement, qui exige que tous ceux qui veulent entreprendre des
travaux obtiennent au préalable un certificat d'autorisation.
Mais
un autre obstacle, plus important encore, freine les investissements.
En ce moment, tous les travaux maritimes sont arrêtés en raison
d'un moratoire, les gouvernements du Québec et de Terre-Neuve et le
gouvernement fédéral étant incapables de s'entendre sur la
propriété des ressources sous-marines du golfe du Saint-Laurent. En
l'absence d'une entente à ce sujet, il est impossible d'attirer des
investisseurs pour explorer cette partie du golfe - qui comprend
notamment la structure Old Harry -, car les bailleurs de fonds
veulent être certains de pouvoir jouir du droit d'exploitation de la
ressource une fois celle-ci découverte. Le gouvernement du Québec a
nommé un mandataire pour négocier, et le ministère des Ressources
naturelles et de la Faune assure qu'il veut régler ce dossier le
plus rapidement possible. "Nous voulons simplifier le processus,
affirme Jean-Yves Laliberté, de la Direction générale du
développement des hydrocarbures au ministère des Ressources
naturelles et de la Faune. L'important n'est pas de savoir à qui les
ressources appartiennent, mais d'en permettre l'exploitation. On
s'occupera des détails ensuite."
Isabelle
Proulx a bon espoir que le moratoire et les questions
environnementales seront réglés sous peu: "Le pétrole, ce
n'est pas seulement de l'essence, c'est un produit qui entre dans la
fabrication des ordinateurs, du plastique, dans presque tout. Et tous
les pays en cherchent. Cette pression-là va faire bouger les
gouvernements pour lever le moratoire au plus vite."
Et
si ça arrivait?
Rêvons
un peu : que signifierait une production à grande échelle de
pétrole et de gaz pour l'économie du Québec? Actuellement, ces
ressources, que nous devons importer, comptent pour la moitié de
notre consommation d'énergie et nous ont coûté 10 milliards de
dollars en 2005. "Pour le Québec, cela voudrait dire une
croissance importante pour de nombreuses années, une capacité de
remboursement de la dette à moyen terme et une revitalisation des
régions. Les aspects positifs sont nombreux et, sur le plan
collectif, un tel boom ne pourrait être qu'une bonne chose",
affirme Stéphane Pallage, professeur d'économie à l'UQAM.
"Bien
sûr, si la découverte est importante, le dollar canadien
s'appréciera, et les exportations manufacturières pourraient en
souffrir, rétorque Pierre Fortin, qui enseigne aussi l'économie à
l'UQAM, mais ce genre de boom est toujours une bonne chose pour une
économie." Selon lui, ce sont les entreprises engagées dans le
projet, le gouvernement (qui empocherait les redevances) et les
travailleurs de la construction qui en profiteraient le plus.
Y
aurait-il un impact pour les consommateurs sur le prix à la pompe ?
"Non, car la production ne suffirait pas pour influer sur le
prix sur le marché mondial. À moins, bien sûr, que l'on soit assez
fou pour subventionner l'essence comme on le fait pour
l'électricité", tient à ajouter Pierre Fortin. Jean-Thomas
Bernard prévoit aussi des retombées intéressantes pour la
province, mais souligne toutefois qu'il faut garder les pieds sur
terre. "Si nous voulons changer le visage économique de la
Gaspésie ou du Québec, il faut voir plus grand. Le Canada produit
3,5 millions de barils de pétrole par jour. Or, pour voir une
différence, il nous faudrait un puits capable de produire de 20 000
à 50 000 barils par jour. C'est possible, ajoute-t-il, et les
prochaines années nous le diront.
Un
beau risque
Au
Québec, c'est connu, les projets exigent un large consensus qui est
parfois difficile à obtenir. Et si l'exploration suscite la
controverse, certains voient déjà venir la tempête si des projets
d'exploitation d'envergure voyaient le jour.
Les
groupes environnementaux rappellent que des accidents peuvent
survenir et qu'en mer, il arrive que le pétrole s'échappe des puits
et contamine l'eau. D'autres croient que le jeu n'en vaut pas la
chandelle. Même s'il y a du pétrole et du gaz naturel au fond du
Saint-Laurent, estiment-ils, on l'épuisera en moins de 40 ans. "Si
nous voulons une société prospère, il faut accepter de courir un
minimum de risques, rétorque Marcel Boyer, économiste à
l'Université de Montréal. En économie, il y a toujours une
relation entre le risque et le rendement, ajoute-t-il, et notre
société est équipée pour gérer ces risques. Si, en plus, cela
crée des emplois en Gaspésie, pourquoi pas?"
Depuis
1997, la province de Terre-Neuve profite abondamment des revenus que
génère Hibernia, une station de forage maritime dans laquelle on a
investi jusqu'à maintenant plus de 700 millions de dollars. Grâce à
cette station, Terre-Neuve est en train de coiffer le Québec au
chapitre de la richesse par habitant. À elle seule, la station
procure un emploi régulier à près de 200 personnes. "Est-ce
qu'Hibernia dérange les baleines tant que ça? Cela reste à voir",
souligne Marcel Boyer.
En
Gaspésie, ils sont nombreux à rêver de pétrole, et si l'impact
d'un boom pétrolier sur l'économie québécoise demeure relatif,
les retombées économiques d'une exploration à grande échelle dans
cette région où le taux de chômage avoisine 25 % les trois quarts
de l'année seraient on ne peut plus claires : en plus de créer des
emplois, elles augmenteraient la consommation dans les commerces de
la région et les investissements.
Les
premiers signes se font déjà sentir. Les sociétés pétrolières
déjà présentes s'approvisionnent à Gaspé, et les commerçants
ont vu une différence. "En Gaspésie, depuis juillet, les gens
posent beaucoup de questions. Avant, ils ne croyaient pas vraiment à
ce projet, mais maintenant, ils y croient, dit Isabelle Proulx. Les
journaux locaux peuvent parler de "boom pétrolier", car
c'est bien de cela qu'il s'agit, et c'est à cela que l'on peut
s'attendre." Pétrolia prévoit forer massivement au printemps
2007, et Québec aimerait régler le différend territorial du golfe
du Saint-Laurent d'ici les prochaines élections. L'avenir nous dira
si, en plus de l'or bleu, nous possédons de l'or noir.
--
David
Descôteaux
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